L’arrêt de la Cour d’appel de Fort de France du 15 mai 2018

Dans cette affaire notre client est victime d’un accident de moto après avoir été surpris par des travaux à la sortie d’un virage et glissé sur des gravillons. Nous avons donc assigné la société qui réalisait les travaux en cause ainsi que son mandant la société EDF devant le Tribunal de grande instance de Fort de France.

La société EDF a alors soulevé l’incompétence du Tribunal de grande instance de Fort-de-France, au profit du Tribunal administratif de la même ville, en soutenant que les actions tendant à la réparation des dommages de travaux publics relèvent de la seule compétence du juge administratif.

Le Juge de la mise en état du Tribunal de grande instance de Fort-de-France a retenu l’incompétence du Tribunal en considérant « que les travaux réalisés étaient destinés à installer, pour le compte d’une personne publique, à savoir la commune d’A…, un câblage électrique souterrain ; que la commande passée à EDF et sous-traitée par la SARL X, s’inscrivait donc dans le cadre d’un chantier public destiné à la distribution d’énergie électrique ».

Nous avons dû interjeter appel de cette décision en faisant valoir la société EDF n’avait jamais effectué ces travaux pour le compte de la commune et qu’elle n’avait d’ailleurs jamais soutenu une telle affirmation !

Il convenait donc d’en revenir à la notion de travaux publics telle qu’elle a été définie par les jurisprudences du Conseil d’état du Tribunal des conflits.

En premier lieu, selon le critère dit de la destination des travaux, peut être qualifié de public un travail immobilier réalisé  pour le compte d’une personne publique, dans un but d’utilité générale (Arrêt CE, 10 juin 1921, Commune de Monsegur, GAJA, n° 41).

Or, les travaux en cause ont été réalisés pour le compte de la société EDF, personne morale de droit privé. Ils ne sauraient donc être qualifiés de ce point de vue, de travaux publics.

En second lieu, en application du critère des modalités d’exécution des travaux, peut également être qualifié de public un travail immobilier réalisé  par une personne publique dans un but de service public, même pour le compte d’une personne privée (TC, 28 mars 1955, Effimieff, Gaja, n° 93).

Ce critère ne saurait, lui non plus, être appliqué à l’espèce, et ce pour la même raison : ni la société X, ni la société EDF, ne peuvent être qualifiées de personnes publiques.

Ainsi, en application de la jurisprudence établie par le Conseil d’Etat et le Tribunal des Conflits, les travaux en cause ne sauraient donc en aucun cas être qualifiés de travaux publics, puisqu’ils n’ont été réalisés, ni par une personne publique, ni pour le compte d’une personne publique.

Dans son arrêt en date du 15 mai 2018 la Cour d’Appel de Fort de France a confirmé la justesse du raisonnement ainsi formulé. Elle a en effet retenu qu’il ne se déduisait pas de l’examen des pièces du dossier qu’EDF réalisait ces travaux pour le compte d’une personne publique et en a donc conlu que « les travaux entrepris par EDF ne revêtaient pas dans ces conditions le caractère de travaux publics ».

La Cour d’appel a alors retenu la compétence du Tribunal de grande instance de Fort de France pour connaître de l’action engagée.

Article similaires